Chronologie des relations de J. Cocteau
avec P. Morand
Avant 1915 : Jean Cocteau a probablement croisé Paul Morand dans le milieu des Bibesco, qu’il fréquenta assez tôt grâce à
l’amitié d’Anna de Noailles.
Avril 1915 : Morand, qui est alors à Londres, ayant appris le lancement du Mot, propose à Cocteau son poème “Le Chant de Charing Cross” daté de 1915. Il y exalte les préparatifs guerriers de l’Angleterre. Cocteau dans sa réponse refuse ce texte avec des raisons obscures. Il signale qu’il a reçu une lettre de Roland Garros qui lui annonce qu’il a abattu un Taube, un avion allemand. La lettre de Garros conservée à la BHVP est datée du 3 avril 1915. Celle envoyée par Cocteau à Morand est donc ultérieure de quelques jours. Cocteau, qui passait alors quelques temps dans une caserne à Paris, annonce qu’il est en train d’écrire un grand poème à la gloire de Garros. Cocteau mentionnera la lettre de Garros dans le numéro 17 du Mot, paru le 1er mai 1915.
Août 1915 : Cocteau mentionne Morand dans une lettre à sa mère.
Septembre 1915 : Cocteau indique à sa mère qu’il a déjeuné avec Morand de passage à Paris.
6 octobre 1916 : ils se rencontrent chez Madeleine Le Chevrel.
10 octobre 1916 : Morand est invité à déjeuner chez Mme Cocteau.
1er novembre 1916 : Cocteau assiste à un petit déjeuner avec Morand, les Berthelot, Misia et Sert.
22 Novembre 1916 : ils vont ensemble à Médrano, puis au bal Tabarin à Montparnasse pour une séance de skating se retrouvent chez Madeleine Le Chevrel et chez Misia Sert.
31 décembre 1916 : réveillon commun. Cocteau choque Morand en criant : « On les aura ! »
9 février 1917 : Hélène Soutzo les invite à manger au Ritz en compagnie de Henri de Béarn et de l’abbé Mugnier.
23 avril 1917 : nouvelle invitation d’Hélène Soutzo avec l’abbé Mugnier, Marcel Proust, Adhéaume de Chevigné et la marquise de Ludre.
18 mai 1917 : première de Parade.
5 juin 1917 : Hélène Soutzo les reçoit en compagnie de la princesse Eugène Murat ( Violette Murat), des Segonzac, de Proust, du comte Zoubov, de Polignac et de l’abbé Mugnier.
15 juin 1917 : lecture du Cap de Bonne Espérance chez Morand, au Palais-Royal [cf. Journal d’un attaché d’ambassade, p.266] en présence des Beaumont, de Valentine Gross, de Porel et de Gautier-Vignal.
12 août 1917 : Cocteau organise une nouvelle lecture du Cap de Bonne Espérance chez Valentine Gross. Il est furieux que Proust n’arrive qu’à minuit, au lieu de 21 heures, accompagné de Walter Berry et de Mme Scheikevitch. Morand était absent [cf. Journal, p.312 et Correspondance de Marcel Proust, t.XVI, p.202]
décembre 1917 : Morand part en Italie, puis à Madrid.
août 1919 : Morand publie un article sur les recueils poétiques de Cocteau dans la revue espagnole Cervantès. (Traduction dans Paul Morand écrivain, Publications de l’Université Paul Valéry- Montpellier, 1993)
octobre 1919 : Cocteau aide à la publication du recueil de Morand, Lampes à arc au Sans Pareil.
7 février : dîner du Samedi auquel participent Les Six, Alexandre Kubitzky (acteur jouant Napoléon dans le film d’Abel Gance), Irène Lagut, Gautier-Vignal, Radiguet.
21 février 1920 : Morand assiste à la répétition générale du Bœuf sur le toit.
7 avril 20 : Cocteau déjeune chez Morand avec Lucien Daudet, Catherine d’Erlanger, Hugo Rumbold et Baba d’Erlanger.
8 avril 20: Cocteau retrouve Morand au restaurant Vendanges de Bourgogne avec Jean et Valentine Hugo, Lucien Daudet et Jacqueline (Rehbinder). Ils terminent la soirée à la foire du Trône (manège d’aéroplanes, cibles, l’Aérogyne).
« Nous vivions un véritable printemps de travail, de recherches, d’inventions, d’amitié entre les arts. On vit même des écrivains s’aimer. » (in Venises)
9 avril 20 : Morand retrouve Cocteau au Théâtre des Champs Élysées en compagnie d’Auric et de Lucien Daudet, de Catherine d’Erlanger et d’Hugo Rumbold. Projet de monter Le Bœuf à Londres.
Samedi 10 avril : dîner chez Gauclair, rue de Richelieu : Cocteau, Radiguet, Lucien Daudet, les Hugo, Darius Milhaud. Le soir, chez Jean Hugo au Palais-Royal, avec Catherine d’Erlanger, Hugo Rumbold, Auric et Ricardo Viñes qui jouent à 4 mains Le Bœuf sur le toit.
Dimanche 11 avril : après dîner chez Jean Hugo avec Cocteau, Radiguet et Lucien Daudet : concours de dessins obscènes.
Mardi 13 avril : dîner chez Jean Hugo avec Lucien Daudet et Cocteau.
Vendredi 16 avril : Morand et Irène Lagut passent voir Cocteau, rue d’Anjou. Ils le trouvent avec Radiguet. Il est question de la disparition du Coq. Soirée chez Jacques Porel chez qui ils retrouvent Lucien Daudet, Léon Paul Fargue, Godebsky, Ricardo Viñes et Alexandre Koubitzky.
Samedi 17 avril : dîner du Samedi chez Mme Alphonse Daudet. Soûlerie générale.
Jeudi 22 avril : Morand et Cocteau se retrouvent chez Jean Hugo en soirée. Lucien Daudet est présent.
Samedi 24 avril : dîner pique-nique chez Francis Poulenc qui est déshabillé par ses convives (selon J. Hugo, il n’y avait rien à manger !).
Dimanche 25 : Morand amène Giraudoux chez Cocteau. Ils vont dîner chez Gauclair avec Marie Laurencin.
Mai et juin 1920 : Morand envoie des articles pour Le Coq.
1921 : Morand participe régulièrement aux réunions du Samedi qui se déroulent souvent au bar Gaya, 17 rue Duphot, inauguré le 22 février 1921.
12 mars : bal chez Caryathis : Jean est en Mercure, Paul en melon marron, sa chemise sortant de sa braguette, Lucien en “Spectre de la rose”, Valentine en tableau de Marie Laurencin, Auric en cuisinier nègre.
18 juin 1921 : première (ou générale) des Mariés de la Tour Eiffel. Morand était-il présent ? Le lendemain, en soirée, salle comble et grand succès.
août 1921 : Morand publie une note sur Les Mariés de la Tour Eiffel, dans la N.R.F.
24 décembre 1921: Morand et Cocteau réveillonnent chez Coco Chanel.
27 février 1922 : Bal des Jeux chez les Beaumont.
15 mai 1923 : Radiguet obtient le prix du Nouveau Monde ; Jean, Max Jacob, Jacques de Lacretelle votent pour lui ; Morand , Giraudoux, Valery Larbaud votent pour Soupault.
Décembre 1923 : Morand assiste aux funérailles de Radiguet.
Fin avril 1925 : à la parution de L’Europe galante, Cocteau
écrit à Morand : “ Tu es le seul prosateur qu’on emporte
dans la poche des poètes.”
30 décembre 1925 : Lecture d’Orphée, avenue de Lamballe.
Morand, Auric, Poulenc, les Milhaud, Tony Gandarillas
(diplomate chilien qui sera l’ami de René Crevel).
Juin 1928 : Bal 1900 chez la princesse Jean-Louis
de Faucigny-Lucinge.
28 juillet 1928 : à la demande insistante de Cocteau, Morand publie un article sur le roman de Jean Desbordes dans Comœdia en réponse à l’article venimeux de M.F. Vanderem dans Candide.
Décembre 1928 : Morand rend visite à Cocteau à la clinique de St Cloud.
Mai 1929 : Cocteau rejoint Morand à la Villefranche-sur-Mer.
Juillet 1930 : probablement sollicité par Morand, Cocteau écrit un article sur Champions du monde dans Gringoire : “Paul Morand et Paul Morand”.
22 janvier 1941 : Cocteau dîne chez les Morand à Paris, en compagnie d’Ernst Jünger.
8 mars 1941 : Morand écrit à Cocteau à propos de Jean Marais dans Britannicus : « Je n’ai jamais vu un plus beau Néron que ton ami, au physique et au moral, c’est merveilleusement sculpté. »
23 novembre 1941 : nouveau dîner chez les Morand. Cocteau y retrouve Ernst Jünger et Gaston Gallimard.
1er avril 1942 : mise en place de la Commission de contrôle
du papier d’édition présidée par Bernard Fay, président du
Conseil du Livre français. Paul Morand en fait partie.
30 avril 1942 : séance rétrospective consacrée au Bœuf sur le
toit à la Radio Nationale. Jean Cocteau y participe avec Jean Wiener.
10 mai 1942 : les Morand sont invités à l’Institut allemand
pour un récital de la cantatrice Lore Fischer ;
15 mai : inauguration de l’exposition Arno Breker à l’Orangerie.Cocteau l’accompagne
jusqu’à l’exposition. Discours de Jacques Benoist-Méchin lors de l’inauguration.
Cocteau écrira Le Salut à Breker, publié à la une de Comœdia, le 23 mai 1942.
16 mai : invitation à l’Institut allemand pour un concert de
Wilhelm Kempff. Cocteau y assiste ; au programme : Jean-Sébastien Bach.
Alfred Cortot et Germaine Lubin auraient participé également
à ce concert. À propos de ce concert Francis Poulenc écrit dans
une lettre à Geneviève Sienkiewicz :
« Malgré tout et l’admirable Kempff, je trouve l’époque lourde,
lourde, moche, moche. » (Lettre du 28 août 1942, in
Centenaire Georges Auric-Francis Poulenc, Université Paul Valéry, 2001, p.250).
18 mai : Cocteau et Breker dînent chez les Morand avec Alfred Cortot.
19 décembre 1954 : Morand félicite Cocteau pour ClairObscur qu’il compare à une perle d’eau douce au bord d’un lac : « Quelle beauté, touchée [ ...] de ton précieux génie. Et si jeune, frais, comme une neige. »
octobre 1955, Morand participe au numéro spécial “ Jean Cocteau“ de La Table Ronde avec un article intitulé « Identité de Cocteau ».
22 mai 1958 : Cocteau déplore publiquement (à la radio) que l’Académie n’ait pas eu le courage d’élire Morand.
23 avril 1959 : Cocteau à Paris pour l’élection à l’Académie. Les absences d’un grand nombre d’académiciens, l’hostilité farouche du clan des résistants, font que Morand préfère se désister. Les deux autres candidats se retirent aussi.
Octobre 1962 : Cocteau rend visite aux Morand à Vevey où il est venu pour l’enregistrement de Histoire d’un soldat à l’invitation d’Igor Markevitch.
Octobre 1963 : Morand renonce à assister aux funérailles de Cocteau, pour marquer sa désapprobation qu’André Chamson ait été chargé de prononcer l’oraison funèbre au nom de l’Académie française. Fidèle à l’amitié de Cocteau, il écrira : « La poésie fut le seul moteur de cet obus fusant qui nous traversa. » (Cité par P. Caizergues).